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Jour 11 : Dégoûtant

 

Les yeux encore gonflés de sommeil, Maëlys glissa ses petits doigts dans la main de Georg. Debout à la lisière de la forêt, les deux enfants patientaient dans un silence de mort. À leurs côtés, se tenaient Rad’yo, le forgeron, et la garde au grand complet – une vingtaine d’hommes, tout au plus,- ce qui ne représentait pas grand-chose au regard de la menace qui se dirigeait vers eux.

Des pas lourds faisaient trembler la terre, les feuilles frémissaient dans les arbres. À l’est, les premières lueurs de l’aube pointaient timidement le bout de leurs rayons. Alors qu’en temps normal les oiseaux commenceraient à piailler dans les frondaisons, les rongeurs à s’agiter dans leurs fourrés, les animaux eux-mêmes pressentaient le danger et préféraient rester à l’abri.

Plus le temps passait, plus le grondement sourd se rapprochait et plus Maëlys sentait la peur l’envahir. Comme s’il lisait en elle, Georg serra un peu plus les doigts de son amie et tourna son visage vers elle. Il lui sourit et reporta son attention sur la forêt.

C’est alors que surgit d’entre les arbres, les déracinant pour les faire lourdement tomber au sol, une créature gigantesque, pourvue de défenses énormes qui sortaient de sa bouche, de deux bras trop longs qui tenaient un gourdin grossièrement taillé, et d’une peau grise verdâtre recouverte de pustules purulentes dont l’odeur nauséabonde leur parvint portée par le vent.

La pestilence insoutenable prit le pas sur la peur dans le cœur de Maëlys, qui lâcha la main de Georg pour se couvrir la bouche et grimaça d’horreur.

— Ah ! C’est dégoûtant ! Papa, c’est quoi ce truc ? demanda-t-elle en reculant de quelques pas.

— Un troll ! s’écria le forgeron de sa voix puissante pour avertir les soldats les plus éloignés…

Au cas où ils n’auraient pas remarqué !

Georg attrapa de nouveau la main de Maëlys, comme poussé par un ordre informulé et Rad’yo écarquilla les yeux.

— Je peux pas lire en lui ! s’exclama-t-elle. Pourquoi je ne peux pas lire dans ses pensées ?

— Alors, allez avertir le village, répondit Tadeus. Que tout le monde s’éloigne le plus possible. Il faut aussi prévenir le Seigneur Gallio ! Qu’il envoie plus de soldats !

La télépathe, encore sous le choc, hocha la tête et s’approcha de Georg, puis s’éloigna en courant. Maëlys la vit disparaître au-delà de la colline et s’engouffrer dans la rue principale du village. Georg lui tira le bras pour l’obliger à se concentrer.

— Les enfants, commença le forgeron, rentrez, vous aussi. Je sais que vous n’êtes pas des enfants ordinaires, mais…

— Non ! s’écria Maëlys.

— C’est après nous qu’il en a, compléta Georg. C’est à nous de régler ça !

— Mais… comment ? interrogea le colosse dont le regard éberlué passait de sa fille au garçon.

Il s’inquiétait pour eux. Mais il connaissait aussi les récits à leur sujet.

À peine eut-il posé la question, les deux enfants s’embrasèrent pour former une seule et unique silhouette plus grande et plus massive, vaguement humanoïde pourvue d’ailes enflammées dans le dos, et de cornes sur la tête. Les soldats reculèrent, terrifiés.

L’alternak fit un pas en direction du troll et poussa un puissant cri de défi qui résonna dans toute la vallée.

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